Pour la première fois, les représentants des principales religions ont appelé à la prudence en matière d’évolution législative sur la fin de vie.
1 – “Le pèlerinage, c’est vraiment un truc de croyant…”
Les « pèlerinages séculiers » décrits par Franck Frégosi, professeur à Sciences-Po Aix et directeur de recherches au CNRS (voir page précédente), tendent plutôt à démontrer le contraire :
« A priori la religion n’y a pas sa place, comme dans la procession de montée au Mur des Fédérés en mémoire des communards au cimetière du Père-Lachaise à Paris. Ceux qui y participent se défient du religieux, ils ont parfois des postures anticléricales voire antireligieuses. En même temps, quelque part en creux, la question du rapport au religieux, ou au sacré, réémerge sous une autre forme et se traduit par tout un dispositif cérémoniel et1rituel mettant en scène une communauté qui se projette par rapport à des évènements historiques bien précis – ici, la Commune de Paris – et qui dresse un horizon d’espérance notamment l’idée d’une société plus juste et d’une République universelle », explique-t-il.
Il ajoute :
« Même dans les pèlerinages dits religieux, je pense à Saint-Jacques-de-Compostelle, bon nombre de gens qui s’engagent sur le pèlerinage ne sont pas spécialement motivés par des raisons religieuses. L’important, c’est l’idée qu’il faut se déplacer d’un point de vue physique et mental : bien souvent arriver à un lieu où serait inhumé un saint ou là où serait passé un prophète n’est pas une fin en soi, c’est aussi une manière de se transcender de l’intérieur. L’épreuve physique permet elle-aussi qu’on accède à une autre dimension de soi ».
2 – “Les pèlerinages, c’est une spécificité chrétienne”
Pas du tout, il existe des pèlerinages dans la plupart des religions. Par exemple celui d’Ouman, en Ukraine, sur les traces du rabbin Nahman (1772-1810), réunit environ 30 000 juifs orthodoxes chaque été ; il existe des pèlerinages bouddhistes sur huit lieux de vie du Bouddha comme à Lumbini, au Népal, où il est né (en -623), à Bodhgaya, où il parvint à l’Éveil ; le grand pèlerinage musulman à La Mecque est le cinquième pilier de l’islam, il doit être réalisé par tous les croyants qui ont les capacités physiques et financières de l’accomplir. Par ailleurs, certains chrétiens, en particuliers les fondateurs du protestantisme Luther et Calvin étaient opposés au culte des saints et des reliques, et donc aux pèlerinages.
Le plus grand pèlerinage du monde, en terme de nombre de participants, est hindou : il s’agit de la Kumbh Mela (littéralement « fête de la cruche »). Cet immense pèlerinage a lieu alternativement tous les trois ans dans une des quatre villes saintes (Allahbad, Haridwar, Ujjain et Nashik) au croisement des trois fleuves Godavari, Kshipra et Gange. Les pèlerins qui se baignent trois fois dans les eaux de chacun des fleuves (durant un cycle de douze ans, donc) seraient libérés du cycle des réincarnations (karma). Cette fête, qui peut durer jusqu’à 65 jours, réunit jusqu’à 70 millions d’hindous.
3 – “Il n’y a qu’un seul lieu de pèlerinage dans l’islam : La Mecque”
Si le hajj, grand pèlerinage à La Mecque qui s’effectue juste avant l’Aïd el-Kébir (fête du mouton, début septembre cette année), est le cinquième pilier de l’islam, il n’est pas pour autant le seul lieu de pèlerinage musulman. Il est d’ailleurs possible de se rendre à La Mecque en dehors de ces jours, ce déplacement est appelé « oumra » ou « petit pèlerinage ».
Il existe aussi d’autres grands rassemblements comme à Nadjaf et Kerbala, en Irak, où les musulmans chiites rendent hommage à Ali – gendre de Mahomet et son successeur légitime pour les chiites – et Hussein – fils d’Ali, troisième imam. Des millions de fidèles musulmans chiites se rendent dans ces villes saintes, qui sont les plus importantes après La Mecque et Médine où vécut le prophète Mahomet. Dans la plupart des pays musulmans, on compte aussi des tombes de saints musulmans, on parle alors de « ziara » (visite) et non pas de hajj. C’est le cas de Marrakech, au Maroc, où des pèlerinages ont lieu en l’honneur des sept saints soufis de la ville, mais aussi à Tombouctou, au Mali, où sept des seize mausolées dédiés aux 333 saints de la ville ont été détruits par le groupe djihadiste Ansar Eddine en 2012. Carte des lieux saints musulmans.