Mohandas Gandhi, Nelson Mandela, Martin Luther King.
L’empereur, le shintô et l’État
Voilà environ 200 ans que le Japon n’avait pas connu une telle situation : l’empereur Akihito a émis en 2017 le souhait d’abdiquer. Ce monarque de 83 ans, intronisé en 1989 à la mort de son père Hirohito, s’estime fatigué et trop âgé pour exercer ses fonctions – exclusivement représentatives. Il voudrait passer la main à son fils aîné, Naruhito, qui deviendrait alors le 126ème empereur de cette unique dynastie régnante. Des archives font remonter cette famille impériale à plus de 1 500 ans – 2 500 selon la légende, qui raconte qu’ils sont en fait les descendant de la déesse shintô du soleil Amaterasu. En japonais, le mot empereur se dit tenno, qui signifie « empereur céleste », pour souligner son ascendance divine.
Le shintoïsme (littéralement « Voix des dieux ») est la religion première de l’archipel nippon. Elle repose sur des offrandes à des esprits – les kami –, divinités qui peuvent correspondre à des éléments naturels (arbres, montagnes, forêts, rizières) ou à des personnes décédées. Il existe aussi des kami locaux, dédiés à un lieu en particulier. Le shintoïsme japonais est influencé par le bouddhisme, importé de Chine vers le VIe siècle, mais aussi par le confucianisme – école philosophique et religieuse issue de Chine. Ce syncrétisme n’a pas vraiment posé de problème jusqu’au XIXe siècle, lorsque le gouvernement de Meiji (1868-1912) sépare officielle le bouddhisme et le shintô en 1871. Il s’agissait surtout de rendre à l’empereur les pleins pouvoirs détenus depuis plusieurs générations par les shoguns [« généraux »] bouddhistes. Cette reprise en main fit du shintô une sorte de religion d’Etat qui impliquait une dévotion et une loyauté totale envers l’empereur. Durant l’ère Meiji, le monarque est considéré comme un dieu vivant, une personne sacrée, il devient aussi le prêtre suprême du shintô. Dans le même temps, l’idéologie militariste gagne du terrain au Japon.
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