Pour la première fois, les représentants des principales religions ont appelé à la prudence en matière d’évolution législative sur la fin de vie.
Les normes religieuses ont-elles une quelconque influence sur le droit commun ? Rien n’est moins sûr ni en France, ni en Europe. Éclairages de Francis Messner, directeur de recherche émérite au CNRS, spécialiste du droit des religions en France et en Europe, et professeur à l’Université de Strasbourg (Unité « Droit, religion, entreprise et société » – DRES).
Quels sont les liens entre lois religieuses et le droit commun ?
« Il n’y a pas de lien direct. Le droit étatique ne considère pas que les normes religieuses sont un ordre juridique contraignant pour l’administration et pour le juge », répond Francis Messner, qui précise que cette situation vaut pour la France comme pour tous les pays européens.
Le spécialiste note qu’il existe des exceptions, « mais elles sont prévues par la loi » : par exemple, en Espagne, au Portugal et en Italie, il existe des conventions, l’équivalent de concordats, qui reconnaissent les effets civils des mariages religieux.
« Cette reconnaissance ne donne aucun pouvoir aux organisations religieuses sur le droit du mariage qui reste règlementé dans les Codes civils de ces pays. Plutôt qu’une exception stricto sensu, il s’agit d’un facilitateur pour éviter que des couples soient obligés de se marier deux fois : une fois religieusement, une autre fois à la mairie », indique Francis Messner.
Cette facilité s’appliquait d’abord aux catholiques, elle a ensuite été étendue à toutes les confessions qui ont ratifié un accord avec l’État : les protestants, les juifs, mais aussi les hindous, en Italie. En France, seul le mariage civil a des effets juridiques. Les ministres du culte qui ne respectent pas le principe d’antériorité du mariage civil sont sanctionnés pénalement.
Autre exception souvent citée, les « tribunaux islamiques » au Royaume-Uni. Il s’agit en fait d’instances qui permettent de procéder à des arbitrages privés, pour régler des différents commerciaux ou familiaux par exemple.
« Dans un deuxième temps, les plaignants peuvent faire appel devant les tribunaux civils, indique Francis Messner, qui souligne que cette disposition n’a pas été créée pour une religion. La technique de l’arbitrage existe pour tout le monde, un peu partout en Europe. Elle vise à éviter l’encombrement des tribunaux. L’arbitrage est mis en œuvre par certains pays, et moins utilisé par d’autres. Dans le cas du Royaume-Uni, cela relève d’une organisation particulière de la société ».
En France, le recours aux arbitrages privés est souvent utilisé par les entreprises dans les cas de contentieux en commerce international, car ils permettent de régler les litiges rapidement et discrètement.
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